Désintoxication

Introduction
Quelques caractéristiques de la désintoxication 
Désintoxication au Canada (incluant le Québec) 
Désintoxication en France
Désintoxication en Suisse 
Désintoxication en Belgique

Note: Les textes qui sont écrits en italique sont des citations reproduites des documents et/ou des sites web consultés et cités. 

Introduction

Arrêter de consommer de l’alcool tout d’un coup n’est pas toujours facile à faire, loin de là. Cela est encore plus vrai lorsqu’une personne a développé une dépendance à l’alcool. Dans ce cas, l’organisme de la personne qui est habitué de recevoir régulièrement une certaine quantité d’alcool va souvent avoir des réactions de manque.

Ce manque va alors s’exprimer par différent symptômes qui sont reconnus, lorsque pris dans leur ensemble, comme étant le syndrome de sevrage. Les symptômes de ce syndrome du sevrage apparaissent généralement de 24 à 48 heures après l’arrêt de consommation et ils peuvent durer de 7 à 10 jours, les 3 premiers jours étant les plus difficiles.

Le syndrome de sevrage se traduit par les différents effets suivants, dont le nombre et l’intensité varient d’une personne à l’autre, selon l’importance de l’intoxication et selon la situation de santé de la personne concernée :

      • Hyperactivité du système nerveux (par ex., sueurs ou pouls de plus de 100/m.)
      • Tremblement des mains
      • Insomnie
      • Nausée ou vomissement
      • Hallucinations temporaires visuelles, auditives ou tactiles ou illusions
      • Agitation psychomotrice
      • Anxiété
      • Crises d’épilepsie
      • Crise de delirium tremens (DT)

Le syndrome du sevrage ne devrait pas être pris à la légère puisque ses symptômes les plus graves (crises d’épilepsie et delirium tremens) peuvent même se révéler mortels dans certains cas. C’est pour cette raison qu’un processus de désintoxication supervisé est fortement suggéré. Sur ce dernier point, certains des sites que nous avons consultés vont même jusqu’à recommander à la personne qui veut diminuer ou arrêter de consommer de l’alcool de consulter d’abord un médecin (généraliste ou spécialiste) afin que ce dernier évalue sa situation personnelle et son état de santé afin de s’assurer qu’elle ne coure pas de risques inconsidérés en lien avec le syndrome de sevrage.

Quelques caractéristiques de la désintoxication

À ce moment-ci, nous croyons qu’il est pertinent de vous présenter une définition générale de la désintoxication, même s’il ne s’agit pas de la seule ni nécessairement de la plus connue. Celle que nous vous proposons provient de la publication « Les services de désintoxication dans les centres de réadaptation en dépendance : meilleurs pratiques et offre de services de base dans le contexte d’un réseau intégré de services » (référence QC-FQCRPAT2008 sur Alco-Rétab:

La désintoxication est par définition le processus métabolique par lequel des substances toxiques sont éliminées de l’organisme. Selon l’American Society of Addiction Medicine (ASAM), la désintoxication est le processus consistant à sevrer une personne d’une substance psychoactive spécifique d’une façon efficace et sécuritaire. La désintoxication implique un arrêt de la consommation pour permettre à une personne de retrouver son équilibre physique à la suite d’une intoxication aiguë ou chronique à l’alcool, aux médicaments ou aux drogues. Le degré de risque associé à cet arrêt est lié à l’état de santé physique et psychique d’un individu, à la nature de la substance consommée, au mode de consommation utilisé ainsi qu’à la condition sociale de cet individu. En fonction de ces variables, la désintoxication est donc vécue différemment d’une personne à l’autre.

Avant d’aborder concrètement les différents aspects de la désintoxication nous devons d’abord insister sur le fait que celle-ci est effectuée différemment en fonction des procédures cliniques en vigueur sur le territoire où se trouve la personne qui en a besoin.

Comme la désintoxication dont nous vous parlons ici est une procédure médicale, nous vous présentons donc les procédures telles qu’elles existent dans les quatre (4) pays de la francophonie les plus étudiées dans le cadre de nos recherches, soit le Canada (incluant le Québec), la France, la Suisse et la Belgique.

Désintoxication au Canada (incluant le Québec)

Pour ce qui concerne les procédures en lien avec la désintoxication médicale au Canada, l’information se trouve à même guide clinique virtuel en vigueur pour le dépistage, l’orientation et le suivi des troubles de consommation d’alcool sur le site conjoint CCDUS – CFMC.

Afin de simplifier la vie à nos lecteurs, nous reproduisons ici l’information principale qui est présentée sur le site, à l’exception des références bibliographiques.

Sevrage : suivi et prise en charge

Cette section est adaptée des lignes directrices sur l’alcoolisme du Ministère de la santé de la Colombie-Britannique (British Columbia Ministry of Health’s Problem Drinking Guideline).

Le sevrage de l’alcool à l’externe est sécuritaire et rentable pour la plupart des buveurs. Seuls environ 20 % des buveurs ont besoin d’être hospitalisés ou admis en clinique pour une désintoxication d’alcool. À l’externe, dans le bureau du médecin, les patients sont traités plus tôt dans l’évolution de leur maladie, ce qui prévient les complications et réduit le besoin d’une hospitalisation. Le sevrage des patients à l’externe est plus efficace chez certaines populations qui n’utiliseront pas la désintoxication en établissement, comme les femmes, les enfants, les jeunes, les personnes âgées, les populations psychiatriques, les personnes atteintes du VIH et les personnes invalides. Si la prise en charge du sevrage est requise, il est plus probable que le patient souffre de dépendance à l’alcool que d’abus d’alcool, et il faut l’orienter.

Contre-indications de la prise en charge du sevrage à l’externe

        • Antécédents de crises ou de délire pendant le sevrage
        • Échecs multiples de tentatives de sevrage à l’externe
        • Affections médicales concomitantes instables (par exemple, coronaropathie, diabète insulino-dépendant)
        • Troubles psychiatriques instables (par exemple, psychose, pensée suicidaire, déficits cognitifs, idées délirantes ou hallucinations)
        • Syndromes additionnels de dépendance aux sédatifs (par exemple, benzodiazépines, acide gamma hydroxybutyrique, barbituriques, opiacés)
        • Signes d’atteinte hépatique (par exemple, jaunisse, ascite)
        • Aucune réponse aux médicaments après 24 à 48 heures
        • Grossesse
        • État de sevrage avancé (par exemple, délire, hallucinations, fièvre de plus de 38,5 °C)
        • Aucun endroit sécuritaire, stable et sans substance, ni pourvoyeur pour administrer les médicaments

Médicaments pour la prise en charge du sevrage

Les benzodiazépines représentent le traitement de choix dans la prise en charge des symptômes de sevrage de l’alcool. Les benzodiazépines réduisent les signes et les symptômes du sevrage, ainsi que l’incidence de délire et de crises. Selon des comparaisons indirectes, il n’existe aucune donnée probante indiquant que certaines benzodiazépines soient plus efficaces que d’autres; il faut faire un choix personnalisé en fonction du patient. L’alprazolam et le triazolam sont déconseillés. 

Le diazépam (Valium®) est recommandé en raison de son profil d’efficacité, sa grande marge thérapeutique et son effet « auto-décroissant » en raison de sa longue demi-vie. On peut aussi considérer d’autres benzodiazépines, comme le clonazépam, le lorazépam et l’oxazépam. Dans les cas d’intolérance aux benzodiazépines, le médecin peut utiliser une autre classe de médicaments (par exemple, les anticonvulsivants). Les médecins ayant peu d’expérience avec le diazépam devraient suivre l’horaire fixe. Les médecins qui ont de l’expérience avec l’emploi du diazépam dans le sevrage de l’alcool peuvent considérer une dose de charge.

Voici trois protocoles médicamenteux :

Tableau 1 : Traitement du sevrage de l’alcool à l’aide du diazépam (Valium)

Horaire Jour 1 Jour 2 Jour 3 Jour 4
Fixe 10 mg quatre fois par jour 10 mg trois fois par jour 10 mg deux fois par jour 10 mg au coucher
Lié aux symptômes 10 mg toutes les 4 à 6 heures au besoin selon les symptômes; dose maximale de 60 mg/jour* 10 mg toutes les 6 à 8 heures au besoin 10 mg toutes les 12 heures au besoin 10 mg au coucher au besoin
Dose de charge** 20 mg toutes les 2 à 4 heures jusqu’à la sédation, puis 10 mg toutes les 4 à 6 heures au besoin; dose maximale de 60 mg/jour 10 mg toutes les 4 à 6 heures au besoin; dose maximale de 40 mg/jour 10 mg toutes les 4 à 6 heures au besoin, dose maximale de 40 mg/jour Aucune

* Fréquence du pouls > 100 par minute, tension artérielle diastolique > 90 mm Hg ou signes de sevrage.
** Il n’est souvent pas nécessaire d’administrer beaucoup de médicaments supplémentaires après la dose de charge initiale. Remarque : Il faut cesser l’administration des benzodiazépines après la disparition des symptômes de sevrage (5 à 7 jours).

Processus pour le sevrage à l’externe

        • Commencer un lundi ou un mardi, à moins qu’un service de fin de semaine soit offert.
        • Voir le patient tous les jours pendant les 3 ou 4 premiers jours et être disponible par téléphone.
        • Faire en sorte que le patient soit amené au cabinet par un pourvoyeur ou un membre de la famille fiable.
        • Prescrire de la thiamine (vitamine B1) à raison de 100 mg par jour pendant 5 jours.
        • Insister sur la prise de fluides avec électrolytes et d’aliments légers, ainsi que sur la modération dans les exercices.
        • Éviter les remèdes naturels, la caféine ou les activités qui font transpirer (par exemple, les bains chauds, les douches, les saunas/huttes de sudation).
        • Évaluer les signes vitaux, les symptômes de sevrage, l’hydratation, l’état émotionnel, l’orientation, l’état physique général et le sommeil lors de chaque consultation.
        • Encourager le patient à contacter les programmes d’aide aux employés alcooliques et toxicomanes de sa région (y compris les autorités sanitaires municipales) et à assister à une réunion des Alcooliques anonymes (AA) lors du jour 3.
        • Surveiller les rechutes, en explorer la cause et la corriger si possible. Si cela n’est pas possible, orienter vers une désintoxication en établissement.

Information particulière au Québec

Le Québec faisant partie du Canada, le processus clinique vu au point précédent s’applique aussi au Québec. Par contre, il nous apparaît nécessaire de vous communiquer certaines informations supplémentaires pour deux raisons :

D’une part, le processus canadien vu plus haut précise dès le début que « Seuls environ 20 % des buveurs ont besoin d’être hospitalisés ou admis en clinique pour une désintoxication d’alcool. À l’externe, dans le bureau du médecin, les patients sont traités plus tôt dans l’évolution de leur maladie, ce qui prévient les complications et réduit le besoin d’une hospitalisation. » Comme nous avons certaines informations qui concernent les autres 80% des cas, nous vous les communiquons.

D’autre part, les sources d’informations du Québec, que nous voyons dans les prochains paragraphes, nous permettent de connaître un exemple de continuum de soins déterminé en fonction des besoins exacts de la personne intoxiquée. Comme il s’agit du seul endroit où nous avons trouvé un exemple de ce type, nous croyons utile de le citer ici.

Voici donc les deux références que nous vous présentons à ce sujet :

En premier lieu, pour ce qui est de la prestation des services de désintoxication, selon ce que nous indique le document « Les troubles liés à l’utilisation de substances psychoactives – Prévalence, utilisation des services et bonnes pratiques » (QC-CIUSSS2015 sur Alco-Rétab, aux pages 60 et 61), ces services sont offerts comme suit :

Les services de désintoxication, nécessaires pour les personnes présentant une dépendance physiologique à certaines SPAa, viennent compléter la gamme de services offerts par les CRDb. Sur la base de l’échelle définie par l’ASAMc qui précise l’intensité de soins requis selon la gravité du sevrage (niveaux I à IV), les CRD peuvent offrir une désintoxication avec hébergement allant jusqu’au niveau III. Ce type de service assure un suivi infirmier 24/7, une supervision médicale et un accompagnement par du personnel psychosocial.

D’autres dispensateurs travaillent en collaboration avec les CRD et complètent le programme-services Dépendances. En continuité avec les services de désintoxication dispensés dans les CRD, les centres hospitaliers habilités assurent pour leur part une désintoxication avec hébergement sous supervision médicale intensive pour les personnes présentant des symptômes de sevrage sévères.

SPAa : Substances psychoactives
CRDb : Centre de réadaptation en dépendance
ASAMc : American Society of Addiction Medicine

En second lieu, selon ce que nous indique le document « Les pratiques reconnues dans les ressources privées ou communautaires offrant de l’hébergement en dépendance. » (QC-CIUSSS2016 sur Alco-Rétab, aux pages 47 et suivantes), les niveaux de services de désintoxication sont les suivants:

Le guide de l’ACRDQ (p. 12-13) mentionne que les services de désintoxication doivent être offerts à certains usagers alcooliques ou toxicomanes en fonction de leurs besoins associés au sevrage. L’ASAM a établi une hiérarchisation des services de désintoxication en fonction de l’intensité des services requis consécutivement à l’évaluation des risques de complication du sevrage et des conditions médicales et psychologiques associées à celui-ci. Il existe quatre niveaux d’intensité dans la gestion de la désintoxication, le niveau 3 comportant lui-même deux sous-niveaux.

a) Désintoxication externe sans soins intensifs (niveau 1-D). Il s’agit généralement de consultations médicales en externe qui accompagnent le processus de sevrage. Le sevrage est ici qualifié de léger.

b) Désintoxication externe avec soins intensifs (niveau 2-D). Le point marquant de ce niveau est la plus grande fréquence des rencontres médicales, notamment par le biais de la disponibilité d’infirmières pour effectuer le suivi quotidien des usagers. Le sevrage est ici qualifié de léger à modéré.

c) Désintoxication avec hébergement (niveau 3-D). On identifie habituellement deux sous niveaux de services de désintoxication avec hébergement. Il y a un niveau plus léger, géré par du personnel détenant une formation psychosociale, et un niveau susceptible de soigner des sevrages dont la gravité est plus importante, donc géré par du personnel infirmier présent 24 heures/24, 7 jours/7, sous supervision médicale.

Désintoxication avec hébergement sous supervision du personnel psychosocial (niveau 3.2-D). Ce type de service résidentiel de désintoxication est caractérisé par l’accent mis sur le rôle des pairs et le soutien social. Il y a possibilité de consultation et de supervision clinique spécialisée pour les problèmes biomédicaux et émotionnels/comportementaux. Les protocoles utilisés pour déterminer la nature des interventions médicales requises (par exemple, la nécessité de soins infirmiers ou médicaux ou le transfert vers une ressource de type 3.7-D ou un centre hospitalier) sont appliqués par des professionnels compétents. Le sevrage est qualifié de léger, mais un besoin d’hébergement est présent.

Désintoxication avec hébergement sous supervision du personnel médical (niveau 3.7-D). Ce type de services internes de désintoxication est offert par du personnel infirmier et médical, sans que soient disponibles toutes les ressources propres à un hôpital général (par exemple, les services de cardiologie, de pneumologie, de radiologie, de chirurgie, etc.). Entre autres caractéristiques, le personnel infirmier est présent 24 heures/24, 7 jours/7, et un médecin est disponible pour évaluer les patients rapidement au besoin. Le sevrage peut être modéré ou sévère sans qu’il y ait de facteurs aggravants nécessitant l’ensemble des soins hospitaliers.

d) Désintoxication avec hébergement hospitalier sous responsabilité médicale (niveau 4-D). Ce type de services internes de désintoxication est offert par du personnel infirmier et médical, dans un hôpital général offrant l’ensemble des soins appropriés ou associés à un sevrage sévère. Le sevrage est sévère et nécessite une intervention hospitalière.

Désintoxication en France

Pour ce qui concerne les procédures de désintoxication en France, l’information se trouve d’abord sur le site ALCOOLINFOSERVICE.FR qui est la principale référence pour le public dans ce pays en ce qui concerne les problèmes de consommation d’alcool. 

DIMINUER OU ARRÊTER
LE SEVRAGE

Le sevrage a pour premier objectif d’éliminer l’alcool du corps en arrêtant totalement sa consommation. Compte tenu du risque d’un syndrome de sevrage, il est recommandé de l’effectuer sous surveillance, aidé d’un traitement médical. Pour la personne dépendante, c’est un challenge important, souvent redouté.

LES MODES DE PRISE EN CHARGE

Ce sevrage peut se réaliser de deux manières.

L’une, est le sevrage « résidentiel », basé sur un séjour de durée variable (d’une semaine à 3 mois environ) dans un l’hôpital ou dans un centre de soins spécialisés.

L’autre est le sevrage « ambulatoire » qui repose sur des consultations médicales rapprochées. Le patient prend son traitement et réside dans son environnement habituel. Certains hôpitaux sont en mesure de proposer une modalité intermédiaire, l’hospitalisation de jour. Dans tous les cas, un arrêt de travail est généralement nécessaire.

Quelle que soit la modalité choisie, l’adhésion du patient est une condition essentielle de la réussite.

LES TRAITEMENTS MÉDICAMENTEUX DU SEVRAGE

Les modalités – résidentielle ou « ambulatoire » – partagent le même objectif : mettre en place l’abstinence en toute sécurité pour le patient. Elles utilisent les mêmes traitements médicamenteux afin d’éviter les complications du sevrage physique.

Dans la plupart des cas, le choix se porte sur des médicaments de la classe des benzodiazépines. Ils permettent non seulement de limiter les tremblements, l’anxiété et l’insomnie dus au sevrage mais préviennent les crises d’épilepsie et le delirium tremens. En général, la prescription ne dépasse pas cinq jours. On leur associe souvent des vitamines (B1 et PP) qui viennent combler les carences fréquentes chez les personnes alcoolodépendantes, carences qui peuvent être à l’origine de graves troubles neurologiques.

Enfin, en complément de ces traitements, une attention accrue est portée à la réhydratation du patient en sevrage (plusieurs litres d’eau par jour pendant la phase critique des cinq premiers jours).  En effet, l’arrêt de la consommation entraîne une déshydratation massive.

Après cette étape de sevrage, d’autres médicaments peuvent être prescrits afin d’aider à maintenir l’abstinence. Ils reposent soit sur la diminution de l’envie de boire, soit sur la dissuasion (la prise d’alcool concomitante au traitement provoque des réactions désagréables).

Dans tous les cas, c’est un accompagnement global médico-psycho-social au long cours qui est le plus à même d’apporter un mieux-être aux personnes en difficulté avec l’alcool. Le soutien des associations d’entraide peut être également bénéfique.

RECOMMANDATION DE BONNE PRATIQUE DE LA SFA

En plus de ces informations destinées au grand public, les informations les plus précises sur la désintoxication en France nous proviennent des pages 39 à 41 du guide clinique « Mésusage de l’alcool, dépistage, diagnostic et traitement – Recommandation de bonne pratique » mis à la disposition des médecins par la Société française d’alcoologie (SFA).

Comment conduire le traitement en vue d’un sevrage ?

Le sevrage se définit comme l’arrêt de la consommation d’alcool, qu’il soit accidentel, imposé par certaines circonstances ou qu’il s’inscrive dans une perspective thérapeutique chez le patient présentant un mésusage de l’alcool. Il peut entraîner un syndrome de sevrage.

Le syndrome de sevrage recouvre des manifestations symptomatiques graduées (mineures, modérées, sévères) survenant dans les suites immédiates ou différées jusqu’au dixième jour suivant cet arrêt. Elles traduisent un état de manque psychique, comportemental et physique.

Le syndrome de sevrage associe de façon variable plusieurs types de manifestations :

          • Troubles subjectifs : anxiété, agitation, irritabilité, insomnie, cauchemars ;
          • Troubles neurovégétatifs : sueurs, tremblements, tachycardie, hypertension artérielle ;
          • Troubles digestifs : anorexie, nausées, vomissements, diarrhée.

Ce tableau peut, dans les heures qui suivent, régresser, s’aggraver ou se compliquer d’accidents de sevrage (hallucinations, convulsions, delirium). Les facteurs de risque prédisposant à la survenue de complications sont la sévérité du mésusage, des antécédents de syndrome de manque et d’accidents de sevrage, une polyaddiction et des comorbidités associées (98). Le syndrome de sevrage est d’intensité limitée et sans complication chez 95 % des personnes alcoolodépendantes (58). Seul un petit nombre de patients (10 à 20 %) nécessite une prise en charge dans le cadre d’un sevrage thérapeutique devant idéalement s’inscrire dans un projet de soins (81, 136). À l’inverse, tous les projets de soins n’impliquent pas un sevrage et a fortiori un sevrage thérapeutique.

Les objectifs du sevrage thérapeutique sont (7, 98) :

          • De dépister et gérer les symptômes de sevrage ;
          • De prévenir la survenue de complications sévères.

Principes généraux de la prise en charge

La prise en charge relève de l’intervention médico-psychosociale avec des approches multiples et graduées proposées après évaluation clinique en fonction des besoins du patient. Elle s’inscrit dans un accompagnement global et un parcours de soins (75). L’orientation des soins les plus adaptés (ambulatoires ou résidentiels) se fait avec l’accord motivé du patient préalablement informé (l’adhésion aux soins permettant l’obtention de meilleurs résultats). L’explication du déroulement du sevrage entraîne une meilleure gestion de celui-ci (68, 98). Le sevrage combiné du tabac est proposé et encouragé (68). L’organisation du post-sevrage est systématiquement évoquée. La préparation d’un sevrage contribue à renforcer sa qualité et diminue ainsi le risque de rechute (7). Un projet de sevrage thérapeutique peut être différé pour se donner le temps de réunir les conditions psychosociales nécessaires à son bon déroulement comme au maintien ultérieur de l’abstinence. Dans tous les cas, l’accompagnement du patient peut toujours déboucher sur un projet de sevrage futur (99).

Le sevrage résidentiel hospitalier ne concerne que 10 à 30 % des sevrages (68, 99). Les indications sont (7, 99) :

          • Un delirium (confusion mentale éventuellement accompagnée d’hallucinations) ou des crises comitiales au moment de l’évaluation ;
          • Un antécédent de delirium ou de crises comitiales (75) ;
          • Une consommation associée de substances psychoactives à doses élevées, notamment prises quotidiennes, anciennes et à fortes doses de benzodiazépines (BZD) (AE) (afin d’ajuster le traitement médicamenteux sans réaliser un sevrage concomitant des benzodiazépines ; celui-ci devra être évoqué dans un deuxième temps) (75).

Certaines circonstances doivent également faire envisager au cas par cas un traitement en résidentiel :

          • Alcoologique : importance du syndrome de sevrage, échec de sevrages ambulatoires itératifs (68, 99) ;
          • Somatique ou psychiatrique : comorbidité sévère ou instable, fragilité liée à l’âge ;
          • Socioenvironnementale : demande pressante de l’entourage, faible soutien social, situation sociale précaire ;
          • Générales : grossesse.

Certains sevrages s’imposent à l’occasion d’une hospitalisation pour un autre motif dans un service non addictologique et justifient le recours à l’équipe de liaison et de soins en addictologie (ELSA) (98).

Le sevrage ambulatoire est à privilégier en dehors des indications de sevrage résidentiel indiquées ci-dessus. Il permet un soin efficace dans le milieu de vie habituel en limitant les coûts. Il prend en compte les comorbidités existantes liées ou non à l’alcool et leurs traitements en cours.

Le suivi clinique rapproché en ambulatoire, au domicile, implique à la fois le médecin traitant et les acteurs soignants associés.

Traitement pharmacologique du sevrage

Pour les publics spécifiques (femme enceinte, adolescent, personne âgée…), se référer à la question 16.

Indications

Bien souvent, l’arrêt ne requiert pas de traitement pharmacologique (7). En effet, le syndrome de sevrage est loin d’être systématique, y compris chez les personnes dépendantes de l’alcool. L’objectif du traitement pharmacologique est de prévenir ou réduire les symptômes sévères du sevrage et les complications induites par la suppression de l’alcool. Il doit être adapté à chaque patient. La voie orale est préférentiellement utilisée mais le recours à la voie parentérale peut s’avérer nécessaire en cas de sévérité des troubles ou de complications (vomissements, état confusionnel). Dans ce cas, la voie intraveineuse (IV) est plus adaptée en cas de troubles de la coagulation et permet une meilleure biodisponibilité (68).

Les benzodiazépines (BZD)

Voir également la question 7, chapitre “Interventions pharmacologiques”.

Elles restent aujourd’hui le traitement médicamenteux de première intention du syndrome de sevrage alcoolique, quand cela s’avère nécessaire (137). Il faut retenir que leur prescription n’est pas systématique, que leur posologie est à adapter à la sévérité et l’évolution du syndrome de sevrage et à la tolérance du traitement, et que la durée de traitement ne doit normalement pas excéder une semaine.

Les vitamines

Voir également la question 7, chapitre “Interventions pharmacologiques”.

Tout patient débutant un sevrage doit bénéficier systématiquement de thiamine. Il n’existe pas, à ce jour d’élément objectif permettant de définir rigoureusement le dosage et la fréquence d’administration de la thiamine (107). À distance du sevrage, l’arrêt des apports en thiamine reste, dans tous les cas, fonction de l’évolution clinique (68). La poursuite de la consommation d’alcool devrait entraîner un maintien de la prescription de thiamine (98) bien qu’il n’existe pas d’évidence clinique pour recommander une prophylaxie à long terme (98).

Autres classes thérapeutiques

Les molécules : baclofène, acamprosate, acide gammahydrobutyrique (GHB), bétabloquants ne sont pas recommandées en l’état actuel des connaissances dans l’aide au sevrage (122). Certains antiépileptiques (carbamazépine, valproate, gabapentine) semblent une alternative intéressante en raison de leurs propriétés et de leurs effets secondaires limités, mais ne montrent pas d’efficacité supérieure aux BZD (138-140). L’instauration d’un traitement antidépresseur n’est pas indiquée pendant le sevrage. Des troubles d’allure psychotique ne répondant pas à un traitement sédatif conventionnel peuvent justifier des neuroleptiques (68).

Traitements associés

Ils sont à adapter à l’état clinique et biologique. En cas de syndrome de sevrage avéré, les apports hydriques doivent être suffisants (en moyenne deux litres par jour) pour compenser les pertes (vomissements, sueurs, diarrhée), sans hyperhydratation et avec correction des troubles électrolytiques éventuels : hyponatrémie de manière progressive, hypokaliémie par apport conjoint de potassium de magnésium (68).

Traitement des complications

Crise convulsive pendant le sevrage

D’autres étiologies en dehors d’un accident de sevrage doivent être éliminées. Après une crise convulsive de sevrage, les benzodiazépines sont administrées le plus tôt possible à dose suffisante pour éviter la récidive et l’évolution vers un delirium tremens (98).

Delirium tremens

Le traitement de première intention reste les benzodiazépines à utiliser à fortes doses, au moins jusqu’à l’obtention d’une légère sédation. L’hospitalisation est impérative et il faut veiller à ce que l’environnement soit aussi calme que possible. Si les BZD ne suffisent pas à contrôler l’agitation, on peut avoir recours à la prescription, en supplément, d’antipsychotiques. Le delirium tremens résistant à ces mesures doit faire envisager un transfert en réanimation (98).

Question 11 – Recommandations

11.1. Le traitement du sevrage est médico-psychosocial, adapté aux besoins et au choix du patient informé (AE).

Le sevrage résidentiel est indiqué dans les cas suivants : delirium (confusion mentale éventuellement accompagnée d’hallucinations) ou crises comitiales au moment de l’évaluation; antécédent de delirium ou de crises comitiales ; consommation associée de substances psychoactives à doses élevées, notamment prises quotidiennes, anciennes et à fortes doses de benzodiazépines (AE). Certaines circonstances doivent également faire envisager au cas par cas un traitement en résidentiel : importance du syndrome de sevrage, échec de sevrages ambulatoires itératifs, comorbidité sévère ou instable, fragilité liée à l’âge, demande pressante de l’entourage, faible soutien social, situation sociale précaire, grossesse (AE).

11.2. Le sevrage ambulatoire est à privilégier en dehors des indications de sevrage résidentiel (AE).

11.3. Dans la majorité des cas, le sevrage ne requiert pas de traitement pharmacologique (grade B), sous condition d’évaluations cliniques soigneuses au préalable puis de façon régulière. Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, un traitement préventif doit être mis en place de manière systématique. Les benzodiazépines sont le traitement de première intention (grade A).

11.4. L’instauration d’un traitement antidépresseur n’est pas indiquée pendant le sevrage, sauf si le patient présente des symptômes dépressifs disproportionnés par rapport à la consommation d’alcool (AE).

En plus de ces indications, la Société française d’alcoologie (SFA) a aussi certains documents techniques: Sevrage simple en alcool, Sevrage alcoolique et comorbidités psychiatriques et  Sevrage d’alcool et de cannabis.

Désintoxication en Suisse

Pour ce qui concerne les procédures en lien avec la désintoxication en Suisse, l’information se trouve sur le site Stop-Alcool.ch qui est la principale référence pour le public dans ce pays en ce qui concerne les traitements médicaux, professionnels et communautaires en lien avec les problèmes de consommation d’alcool. Pour faciliter la lecture des textes pertinents, qui sont disséminés sur différentes pages du site, nous les avons rassemblés mais les liens vers les pages originales sont insérés aux endroits pertinents.

Afin de simplifier la vie à nos lecteurs, nous reproduisons ici les principales informations qui sont présentées sur le site, à l’exception des références bibliographiques.

Comment traiter les problèmes d’alcool ?

Le sevrage n’est pas la seule étape importante pour arrêter de boire. Anticiper et se préparer à l’arrêt permet d’augmenter les chances de réussite.

Le sevrage débute 24 heures après une réduction importante ou l’arrêt de la consommation. Il dure une bonne semaine, en sachant qu’après les 3 premiers jours, le plus difficile est passé.

Une réflexion autour du maintien de l’abstinence s’impose :

        • Qu’est-ce qui me motive à arrêter de boire ?
        • Que dois-je changer dans ma vie pour réussir ?

ImportantTout sevrage d’alcool nécessite une prise en charge par un médecin (de famille ou spécialiste)! Chaque individu va réagir différemment à l’introduction d’un traitement. Certaines complications liées aux syndromes de sevrage sont potentiellement graves et dangereuses (crise d’épilepsie, détresse respiratoire, delirium tremens, hallucinations, etc.). 

Sevrage : quels sont les symptômes de manque ?

Arrêter de boire n’est pas facile, surtout si l’on est dépendant de l’alcool. L’organisme, habitué à recevoir une quantité d’alcool, réagit par divers symptômes de manque, appelés syndrome de sevrage, qui surviennent déjà après quelques heures de privation.

Les symptômes de sevrage

        • Hyperactivité du système nerveux autonome (par exemple, sueurs ou pouls supérieur à 100/minute)
        • Tremblement des mains
        • Insomnie
        • Nausée ou vomissement
        • Hallucinations temporaires visuelles, auditives ou tactiles ou illusions
        • Agitation psychomotrice
        • Anxiété
        • Crises d’épilepsie
        • Crise de Delirium Tremens

L’effet “gueule de bois”

Phénomène bien connu, ce trouble survient suite à l’ingestion d’une trop forte quantité d’alcool en une seule occasion. Quelles en sont les symptômes ? Les causes et les conséquences ? Comment y remédier ?

La gueule de bois est le terme que l’on donne a une ensemble de symptômes consécutifs à une intoxication à l’alcool.

Les symptômes 

        • Fatigue, faiblesse et soif
        • Douleurs musculaires, céphalées
        • Nausée, vomissement, douleurs d’estomac
        • Perturbation du sommeil
        • Vertiges
        • Sensibilité à la lumière et au son
        • Diminution de l’attention et de la concentration
        • Dépression, anxiété, irritabilité
        • Tremblements, sudations, accroissement du rythme cardiaque

Les causes

L’origine est multifactorielle et n’est pas encore complètement élucidée.

La plupart de ces symptômes seraient directement provoqués par l’effet de l’alcool (éthanol) sur l’organisme (déshydratation, perturbations gastro-intestinales, perturbations du sommeil et du rythme biologique…) ou par l’effet des métabolites de l’alcool (acétaldéhyde).

Certains symptômes, comme les changements d’humeurs, seraient également liés à un effet de “sevrage” suivant une alcoolisation aiguë. Selon Swift et Davidson (1998), ces symptômes seraient des sortes de “manifestations atténuées d’un syndrome de sevrage”, même chez les buveurs qui ne sont pas alcoolodépendants.

Mais ces hypothèses sont contestées selon d’autres scientifiques: les méfaits seraient plutôt explicables par d’autres substances contenues dans les boissons alcoolisées – en plus ou moins grande quantité selon le procédé de fabrication – comme le méthanol.

Prévenir

Les gestes pour prévenir la gueule de bois sont simples:

        • Limiter sa consommation excessive et observer des périodes d’abstinence d’au moins 2 jours
        • Espacer le plus possible le temps entre chaque verre.
        • Boire de l’eau en suffisance

L’essentiel en bref

La “gueule de bois” est un signal de votre corps vous indiquant que vous vous êtes intoxiqué(e). Restez à l’écoute de ce message! Si vous connaissez régulièrement des épisodes de “gueule de bois”, interrogez-vous sur votre consommation, elle peut être à risque.

Les dangers d’un sevrage brutal : le Delirium Tremens

Le Delirium Tremens survient rapidement chez les personnes qui sont très dépendantes à l’alcool, lorsqu’elles arrêtent de boire. C’est la conséquence la plus grave du syndrome de manque.

Comme son nom l’indique, il s’agit d’un délire tremblant. C’est une complication grave typique du sevrage d’alcool, qui est potentiellement mortelle, notamment en raison du risque de déshydratation et d’étouffement (conséquence de l’agitation). Il existe des médicaments pour calmer ces symptômes.

C’est pourquoi tout sevrage d’alcool nécessite impérativement
un suivi médical.

Dans le cerveau, l’alcool reproduit l’effet d’un neurotransmetteur dénommé gaba, qui contrôle la communication entre les neurones en inhibant le rôle d’autres neurotransmetteurs excitants telle la noradrénaline, la sérotonine ou la dopamine… Le cerveau intoxiqué à l’alcool réduit donc la production de gaba.

Lors d’un sevrage brutal, sa fabrication est insuffisante pour limiter l’action des neurotransmetteurs excitants. Le cerveau rentre alors en suractivité et le système nerveux n’est plus capable de contrôler la tension artérielle, le rythme cardiaque et la température du corps. Le patient souffre alors d’hallucinations, d’hypertension, de fièvre, et risque la mort.

Attention : Certaines de ces complications sont potentiellement graves et dangereuses. Les crises d’épilepsie prolongées peuvent aboutir à une détresse respiratoire avec manque d’oxygène.

Un Delirium Tremens nécessite une prise en charge médicale.
Il est absolument vital de ne jamais laisser la personne seule
durant son délire !

(Une partie de la page originale n’est pas reproduite pour des raisons de simplification)

Médicaments lors du sevrage aigu d’alcool

Tout sevrage d’alcool doit pris en charge par un médecin généraliste ou un médecin spécialiste. Les complications peuvent être mortelles. Un sevrage physique dure de 3 à 10 jours. Il peut se faire en ambulatoire ou en hospitalier et implique un suivi régulier aux 2-3 jours avec un traitement médicamenteux.

Durant la période de sevrage, le système nerveux central n’est plus sous l’influence de l’effet dépresseur de l’alcool, autrement dit les fonctions cérébrales ne sont plus ralenties. Des complications peuvent alors survenir, telles que des crises d’épilepsie ou le delirium tremens. 

Les symptômes de sevrage sont : agitation psychomotrice, anxiété, insomnie, tremblements, sudations, tachycardie, hypertension puis hyperthermie, délire, convulsions.

Note importante : Tous les médicaments comportent des effets secondaires qui se distinguent notamment par leur fréquence, leur gravité et leur réversibilité. Chaque individu va réagir différemment à l’introduction d’un traitement et ne va pas forcément expérimenter les effets décrits ci-dessous. Il est impératif d’être suivi par un médecin lors de toute prise de médicaments, et notamment face aux problèmes avec l’alcool, lors du sevrage et du maintien de l’abstinence.

Voici des traitements que le médecin pourrait vous prescrire pour vous aider :

Les Benzodiazépines

Les médicaments couramment utilisés durant le sevrage sont les benzodiazépines qui, par leurs propriétés sédatives (tranquillisantes), myorelaxantes (qui détend les muscles) et anticonvulsivantes (contre les crises d’épilepsies) en font le meilleur traitement du sevrage. Ces médicaments abaissent les signes de manque et les éventuelles complications. Idéalement, ce traitement doit être de courte durée, le temps que les signes physiques de manque disparaissent. En effet, les benzodiazépines n’ont pas montré d’efficacité sur le maintien de l’abstinence ou sur la diminution des consommations d’alcool à long terme.

Il est important lors du sevrage de couvrir les signes de manque avec une dose adaptée de benzodiazépines. Le choix de la molécule (parmi les benzodiazépines) est moins important.

Les Bêtabloquants, anticonvulsivants et neuroleptiques

Les bétabloquants (ex: propranolol = Avlocardyl®), les anticonvulsivants (ex: carbamazépine = Tegretol®) et les neuroleptiques (ex: halopéridol = Haldol®) ont également été étudiés comme traitement du sevrage. Ces médicaments sont utilisés conjointement avec les benzodiazépines pour renforcer leurs effets sur des symptômes spécifiques comme les risques de crises convulsives (= crises d’épilepsie) ou les hallucinations dues à un delirium tremens.

La vitamine B1

La vitamine b1 (thiamine) est également prescrite lors des sevrages dans le but de prévenir des atteintes neurologiques graves comme l’encéphalopathie de Gayet-Wernicke (atteinte d’une zone du cerveau appelée « corps mamillaires » en raison d’une carence ou d’un défaut d’absorption de la vitamine B1).

Le Baclofène® ou Lioresall®

Le baclofène est un médicament très controversé. 

En Suisse cet Agoniste GABA-B baclofène, myorelaxant, peut être utilisé comme addictolytique en prescription « off-label » jusqu’à la dose reconnue par Swissmedic (80 mg/j. en ambulatoire) sous la responsabilité du médecin. La dose de départ est de 3 x 5 mg/j, à augmenter de la même quantité tous les 3 jours. Ce médicament a de nombreux effets indésirables (vertiges, somnolence, …) et doit pour l’instant être prescrit en cas d’échec des traitements décrits ci-dessus.

En France, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a annoncé en octobre 2018 l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché au baclofène dans l’alcoolodépendance.

Lire notre récent article sur le Baclofène

Foire aux questions / conseils du forum

Message pour tous: faire appel à un médecin.

Pourquoi faire appel à un médecin lorsqu’on souffre d’une dépendance ?

Parce que la dépendance est une maladie, et qu’une maladie, cela se soigne. Le sevrage, c’est-à-dire l’arrêt de consommation d’une substance n’est pas un fait anodin : des symptômes de sevrage peuvent apparaître, et certains sont dangereux pour la santé, voire mortels. Ainsi, il est impératif d’informer son médecin traitant lorsqu’on envisage de viser une abstinence, et même une modération de la consommation d’alcool.

Par ailleurs, lorsqu’on est dépendant d’une substance, le fait d’arrêter de consommer n’est pas suffisant. Le maintien de l’abstinence (ou bien de la consommation contrôlée) est une étape tout aussi importante, et qui passera probablement par un traitement complémentaire : travail motivationnel, psychothérapie individuelle selon différents modèles, etc. Ceci permet le traitement de troubles associés (dépression, trouble de la personnalité, etc…), mais également d’arriver à la compréhension de la dépendance dont on souffre, et des raisons psychiques de son existence. C’est souvent l’arbre qui cache la forêt…

Les médecins de famille sont en général les premiers que l’on informe. Il est possible avec eux de discuter de la façon dont on va pouvoir traiter le problème de dépendance. Néanmoins, il est également possible de faire appel à certains spécialistes comme les psychiatres, et les alcoologues (spécialistes du domaine de l’alcool). Soutien et psychothérapie peuvent également être réalisés par un psychologue, mais celui-ci ne s’occupe pas de la santé physique et ne peut prescrire de traitement.

Lorsqu’on fait partie de l’entourage, on peut également faire appel à un médecin. En effet, on peut éprouver une souffrance telle que notre quotidien est affecté par la dépendance d’un proche. C’est le cas, par exemple, lorsqu’une codépendance existe : anxiété, difficulté à se concentrer, difficulté à se situer, à savoir quoi faire, comment poser des limites, comment ne pas se laisser envahir par les problèmes d’autrui… L’entourage a tout autant besoin de soutien ! Et, quand on prend le rôle de soutien pour un proche, ce n’est pas facile d’admettre que l’on a besoin d’être aidé à son tour… Parlez-en à votre médecin.

Désintoxication en Belgique

En ce qui concerne le processus de désintoxication en Belgique, nos recherches nous amènent à constater la disponibilité d’informations en ligne autant pour le grand public que pour les médecins.

Nous vous présentons d’abord les informations recueillies à partir de deux (2) pages du site Aide Alcool  qui s’adresse au public.

Symptômes de sevrage

Lors de l’arrêt ou de la réduction drastique d’une consommation excessive et prolongée d’alcool, des symptômes de sevrage peuvent apparaître. Leur gravité et leur durée peuvent varier fortement, de la banale «gueule de bois» à un delirium tremens mortel.

Si vous avez bu beaucoup pendant longtemps et que des symptômes de sevrage apparaissent après avoir réduit ou arrêté votre consommation d’alcool, il est fortement conseillé de consulter votre médecin de famille ou un autre expert médical. En effet, il est impossible de prévoir comment votre situation évoluera. Un médecin peut également prescrire un traitement de soutien, qui atténue les symptômes du sevrage et limite les risques.

1 – La « gueule de bois »

Toutes les personnes qui ont « trop » bu un jour savent ce que c’est et les personnes qui boivent modérément le savent généralement aussi. Dans ce dernier cas, il s’agit de l’effet d’une intoxication légère par l’alcool. Chez les buveurs excessifs, la gueule de bois peut aussi être un syndrome partiel de sevrage, causé par une forte baisse de la quantité d’alcool dans le corps pendant le sommeil.

Certains buveurs excessifs compensent ces symptômes de sevrage en commençant à boire tôt dans la journée. C’est ce que l’on appelle la « la consommation matinale ».

La gravité de la gueule de bois dépend de la quantité d’alcool absorbée, du type de boisson (certaines boissons provoquent plus rapidement une gueule de bois à cause des substances qu’elles contiennent), de la sensibilité individuelle et de la condition physique et mentale de la personne concernée.

Symptômes : sensation de malaise général, fatigue, mal de tête, bouche sèche, nausées, envies de vomir, vertiges, hypersensibilité aux stimulations et parfois aussi angoisses, mélancolie, culpabilité et remords (« je ne boirai plus jamais »).

2 – Les symptômes du sevrage « sans complications »

Ils commencent à se manifester habituellement 24 heures après la réduction drastique ou l’arrêt d’une consommation excessive d’alcool de longue durée.

Le symptôme principal prend la forme de tremblements, en particulier des mains, mais aussi parfois de la tête et de la langue. Les tremblements peuvent être faible tout comme ils peuvent être vraiment forts.

Les symptômes sont analogues à ceux d’une gueule de bois, mais beaucoup plus prononcés.

Autres symptômes : sueurs froides et/ou chaudes, pouls accéléré, parfois aussi hyperventilation et hypertension. La personne peut également présenter une forte agitation, de l’irritabilité, avoir des troubles du sommeil, des cauchemars, des angoisses et être d’humeur dépressive.

On observe souvent aussi un « état de manque », c’est-à-dire, un désir irrépressible et obsessif de consommer à nouveau de l’alcool.

Il peut enfin se produire une confusion passagère. La personne peut présenter des troubles de la perception au cours desquels, par exemple, elle « voit des bestioles ». Ces symptômes ne durent généralement pas très longtemps et la personne est en général parfaitement consciente du fait que ce qu’elle voit ou entend n’est pas la réalité.

Ces symptômes ne sont pas dangereux en soi et disparaissent habituellement au bout de 7 à 10 jours d’abstinence. Après 24 heures, les symptômes de sevrage atteignent un pic et, après trois jours, le pire est passé. Cependant, les idées noires et l’insomnie peuvent persister pendant plusieurs semaines.

3 – Le syndrome de sevrage 

Le terme « doux » est ici très relatif. Lorsque vous souffrez des symptômes énoncés précédemment, n’hésitez surtout pas à contacter votre médecin traitant ou à vous rendre aux urgences d’un hôpital.

On peut maintenant faire une distinction entre le pré-délirium, les crises d’épilepsie et le délire alcoolique.

3.1 Le pré-délirium

Tous les symptômes décrits précédemment peuvent se produire, mais sous une forme plus grave.

Les tremblements sont beaucoup plus graves et rendent l’élocution de la personne difficile tout comme ils tendent à rendre les mouvements maladroits et la démarche plus déséquilibrée.

De véritables hallucinations se produisent, au cours desquelles la personne n’est plus capable de faire la distinction entre l’illusion et la réalité. Ces hallucinations peuvent être un signe précurseur d’un délirium tremens.

De fortes fluctuations peuvent se produire au cours d’une même journée. En général, on observe une détérioration de la situation à la nuit tombante, avec une peur intense et une anxiété, et parfois des délires de persécution et des hallucinations lors desquelles la personne voit des bestioles.

3.2 Les crises d’épilepsie consécutives à un sevrage alcoolique

Elles peuvent être importantes, avec une perte de conscience et une contraction générale du corps et des secousses musculaires violentes. Le risque de crises d’épilepsie est plus élevé si la personne :

1) consomme des sédatifs (benzodiazépines, barbituriques, etc.) en plus de l’alcool;
2) a déjà souffert d’épilepsie; et
3) a subi précédemment un traumatisme crânien (par ex. à la suite d’un accident ou d’une bagarre).

Les crises du sevrage alcoolique se produisent habituellement au cours des 10 à 36 premières heures suivant l’arrêt de la consommation d’alcool. Parfois, elles surviennent encore plus tard, mais il s’agit alors généralement d’un syndrome de sevrage dû à la combinaison d’alcool et de sédatifs.

3.3 Le délire alcoolique

Peut se produire après 48 à 72 heures de sevrage alcoolique.

Dans ce cas, il se produit des hallucinations très vives et persistantes, des hallucinations auditives, mais parfois aussi visuelles. La personne concernée « entend » en général d’autres personnes parler d’elle et se sent menacée ou suivie.

4 – Le délirium tremens

C’est le syndrome de sevrage alcoolique le plus grave, qui peut persister plusieurs jours. Grâce aux méthodes de traitement actuelles, une issue fatale est plus rare mais elle reste possible (surtout dans un état de grande faiblesse physique). Une aide médicale est donc nécessaire.

Il s’agit d’un état de conscience diminuée, une désorientation dans le temps et l’espace, et des épisodes d’hyperactivité (avec parfois des activités imaginaires compulsives).

Des hallucinations très vives peuvent se produire. En plus de « voir des bestioles », vous avez parfois l’impression que des images sont projetées sur les murs, comme dans un film.

Apparaissent également de violents tremblements, une sudation abondante, des troubles du sommeil persistants, de fortes angoisses et enfin de la fièvre, des palpitations et des symptômes de déshydratation.

La seconde page d’intérêt porte sur les médications d’aide au sevrage semblables à celles que nous avons vue précédemment sur cette page pour d’autres pays:

Traitement de soutien

Si vous souhaitez recevoir un traitement de soutien pour réduire ou arrêter votre consommation d’alcool, il est conseillé de vous adresser à votre médecin de famille ou à un autre médecin qui connaît votre problème. Globalement, il existe 3 formes de médication pouvant être prises pendant le sevrage d’alcool :

Médication qui contrecarre le sevrage

Certains traitements ont pour fonction de compenser les symptômes du sevrage et de prévenir l’apparition d’une crise d’épilepsie ou d’un delirium tremens. Par ex. : Valium®, Tranxène®, etc. Ces calmants sont parfois prescrits temporairement aussi aux personnes très stressées par la perspective de réduire leur consommation d’alcool ou d’arrêter de boire, ou qui sont très tendues de manière générale.

        • Ces substances ne peuvent toutefois être utilisés que quelques semaines, car ils provoquent eux aussi une forte addiction.
        • Ils peuvent aussi avoir des effets secondaires tels que fatigue, somnolence, torpeur et troubles de l’attention. Il est très fortement conseillé de ne pas les associer à l’alcool car ce dernier peut quadrupler leur action anesthésiante. Un surdosage de benzodiazépines en association avec de l’alcool peut provoquer une issue fatale.

Médication qui réduit l’envie

Le Campral® est un médicament prescrit pour diminuer le désir de boire (mais ne le supprime généralement pas totalement). Cette diminution n’apparaît généralement qu’après 3 semaines environ. Cette médication est souvent prescrite aux personnes qui ont déjà fortement réduit leur consommation ou qui ont arrêté de boire et veulent éviter de retomber dans leurs anciennes habitudes. Elle peut également être prescrite aux personnes qui souhaitent réduire leur consommation ou arrêter de boire. Le produit semble en effet protéger quelque peu le cerveau contre le «choc» du sevrage.

        • L’utilisation de Campral® ne comporte aucun risque mais il peut parfois y avoir de légers effets secondaires transitoires. Ces effets secondaires peuvent être : nausées, céphalées, vertiges et diarrhées.

Médication qui vous rend malade lorsque vous buvez

Antabuse® rend malade lorsque vous buvez de l’alcool. L’utilisation de cette substance n’a toutefois de sens que s’il est pris de plein gré. Il agit alors comme «un moyen de pression» et peut être considéré comme une assistance lors des «moments de faiblesse». La prise d’Antabuse® présente un gros avantage dans le sens où vous ne devez décider qu’une seule fois par jour de ne pas boire, en l’occurrence au moment où vous le prenez. Antabuse® ne constitue généralement pas une solution à long terme mais peut être très efficace au moment de casser des habitudes de consommation d’alcool «bien enracinées». De très nombreuses personnes l’ont utilisé avec succès pendant la phase initiale de la désintoxication mentale.

      • Antabuse® peut avoir des effets secondaires, qui sont généralement légers et de courte durée. Les effets secondaires possibles sont : légères nausées, céphalées, troubles gastro-intestinaux, «arrière-goût» et diminution de la libido.
      • Comme son effet sur l’organisme peut être très violent si vous continuez à boire, il n’est généralement pas prescrit aux personnes souffrant de troubles cardiaques ou sujettes à des crises d’épilepsie. La prudence est requise en cas de diabète, de maladies du foie, d’inflammations des reins, de certaines formes de lésions cérébrales et d’hypersensibilité au produit.
      • Si vous voulez utiliser Antabuse, il est conseillé de le faire sous la surveillance d’un médecin.

Finalement, à partir du site de la Société Scientifique de Médecine Générale (SSMG), nous vous présentons deux (2) vidéos qui portent sur le sevrage et qui s’adressent aux médecins en premier lieu.

Un premier vidéo vise à informer adéquatement les médecins belges sur d’éventuels cas de sevrage à accompagner. Ce vidéo est aussi accompagné d’un résumé / aide-mémoire. Il est intéressant de noter que l’unique référence utilisée pour préparer ce document est celle du guide clinique produit par la Société française d’alcoologie (SFA) vu précédemment et intitulé « Mésusage de l’alcool, dépistage, diagnostic et traitement – Recommandation de bonne pratique » (pages 5 à 84). Deux autres documents portant sur le sevrage et disponibles sur le site belge originent aussi de la SFA. Voici maintenant le résumé du vidéo:

Le sevrage

C’est un ensemble de troubles subjectifs (anxiété, agitation, irritabilité, cauchemars, etc.), de troubles neurovégétatifs (sudations, tremblements, tachycardie, hypertension artérielle, etc.) et de troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhée, anorexie, etc.).

Les accidents de sevrage sont les hallucinations, les convulsions et le délirium.
Les facteurs de risque de survenue de telles complications sont la sévérité du mésusage, les antécédents de syndrome de manque et d’accidents de sevrage, une polyaddiction et le poids des comorbidités associées.

En ambulatoire ou à l’hôpital ?

70 à 90% des sevrages peuvent se faire en ambulatoire.
Les indications du sevrage résidentiel sont :

          • un délirium ou une crise convulsive au moment de l’évaluation ou dans les antécédents
          • une consommation concomitante de substances sédatives, notamment un abus de benzodiazépines (BZD)
          • l’échec de sevrages ambulatoires itératifs
          • l’importance du syndrome de sevrage ou de la dépendance physique
          • une comorbidité somatique ou psychiatrique sévère
          • un faible soutien social.

Si un sevrage à domicile est envisagé, une consultation avec le médecin une fois par jour les 5 premiers jours se justifie pleinement. En dehors de ce contact quotidien, le médecin veillera à rester disponible par téléphone. La collaboration du réseau multidisciplainaire doit être envisagée (infirmière, kiné, etc).

Traitement pharmacologique du sevrage

      • Bien souvent l’arrêt ne requiert pas de traitement pharmacologique (EBM grade B), sous condition d’évaluations cliniques soigneuses au préalable, puis de façon régulière. Lorsque ces conditions ne sont pas réunies (ce qui est souvent le cas à domicile), un traitement préventif doit être mis en place systématiquement.
      • Les benzodiazépines sont le traitement de première intention (EBM grade A). La durée de ce traitement ne doit pas excéder une semaine. La posologie doit être adaptée à la sévérité du sevrage et à la tolérance du patient à l’effet sédatif des BZD prescrites.
        Schéma classique sur base de Valium 10 mg. Jours 1 et 2 : 1-1-1-1. Jour 3 : 1-0-1. Jour 4 : 0-0-1. Jour 5 : 0.

Autres traitements

      • Tout patient débutant un sevrage doit bénéficier systématiquement de thiamine (= vitamine B1 : minimum 300 mg / jour ), le plus souvent per os ( par exemple Befact 3 X 1 /jour). Il s’agit d’assurer la prévention de l’encéphalopathie de Wernicke, prélude du syndrome de Korsakoff.
      • Les vitamines B seront injectées en cas de dénutrition, de troubles du transit digestif,
        d’antécédents neurologiques, d’antécédents de délirium) : par exemple Neurobion 1 IM /jour pendant 5 à 8 jours (ou en IV en présence d’un trouble de la coagulation lié à une cirrhose éventuelle).
      • Des échelles d’évaluation de la sévérité du sevrage existent et peuvent aider le praticien.

Bon à savoir

      • Un traitement de sevrage par BZD n’induit pas de dépendance. Il ne faut pas hésiter à prescrire des BZD si l’indication est posée.
      • Un sevrage à domicile justifie une ITT de 3 à 7 jours (en rasion du risque convulsif, des effets secondaires des BZD…)
      • Si on est mal à l’aise par rapport à une situation clinique : la cellule alcool de la SSMG propose  l’aide « doc to doc »

Un second vidéo présente une consultation médicale type entre un médecin et son patient lors de laquelle la question du sevrage est abordée.